Bruxelles somme Paris de casser son monopole sur les jeux

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Le torchon brûle entre la Commission européenne et la France sur la question des paris en ligne. Demain, elle déclenchera une procédure d'infraction contre Paris. Dans le collimateur, les paris hippiques et sportifs. Nos révélations.

C'est un véritable coup de tonnerre qui s'abat dans le monde des jeux d'argent : la Commission européenne va officiellement poursuivre la France et son monopole. Car, estime l'Irlandais McCreevy, le patron du marché intérieur, l'Hexagone surprotège le PMU et la Française des jeux et refuse la concurrence qui profite aux joueurs. Dès demain, comme l'a confirmé hier un haut responsable de la Commission à notre journal, « une procédure d'infraction va être déclenchée contre la France et un avis motivé approuvé collégialement lui sera dépêché ».

En réponse, notre pays disposera de trois mois pour se plier à l'injonction, c'est-à-dire pour ouvrir ses paris sur Internet à la concurrence. Faute de quoi, Bruxelles traduira la France devant la Cour de justice de Luxembourg. Avec, selon elle, les risques de condamnations que cela suppose.

* Les récriminations de Bruxelles. « Les explications de la France ont été insuffisantes » nous a confié un proche du dossier à Bruxelles, déçu par les mois de « dialogue de sourds » qui ont suivi l'emprisonnement spectaculaire des dirigeants de Bwin, cette société autrichienne de jeux sur Internet. De fait, la création d'un comité d'éthique et l'interdiction des jeux aux mineurs ont été jugés totalement insuffisantes. « La France, poursuit le haut responsable, continue de vouloir maintenir son monopole alors que ses opérateurs, eux, offrent des paris sur dans d'autres pays. Elle ne peut pas vouloir garder la maîtrise de l'offre de jeux, en invoquant la protection des joueurs, et continuer à mettre des milliards d'euros dans des campagnes marketing pour les pousser à jouer . »

* Paris droit dans ses bottes. 25 milliards d'euros de recettes annuelles, avec la bagatelle de 5 milliards qui tombent directement dans les caisses de l'Etat... Pas étonnant qu'à Paris, où l'on redoute de grosses pertes en ligne, le gouvernement prenne la menace très au sérieux. Outre une lettre circonstanciée de Christine Lagarde et Eric Woerth à Charlyie McCreevy le 14 juin dernier, François Fillon, le Premier ministre, a, selon nos informations, personnellement défendu les intérêts français auprès du président Barroso. « Nous souhaitons qu'une négociation de fond s'ouvre au niveau européen car le jeu n'est pas une activité comme les autres, des pays comme les Etats-Unis ou l'Australie commencent à le comprendre », expliquait-on hier à Bercy. « Au plan juridique, nous avons une position très solide et ne craignons pas d'aller devant la Cour de justice. La France ne se couchera pas ! »

* Une issue incertaine mais... Paris seul contre tous ? Pour les experts de Bruxelles, une telle situation ne sera pas tenable éternellement. Tout simplement parce qu'au-delà des procédures - qui peuvent effectivement durer plusieurs années - la Commission a déjà obtenu des efforts significatifs chez nos voisins. Le Portugal, par exemple, a interdit toute publicité sur ses loteries nationales, l'Allemagne a fermé les sites Internet de ses opérateurs publics, l'Italie, après avoir ferraillé pendant des années, ouvre son monopole. Dans la foulée, Bruxelles compte aussi sur la pression des joueurs. La perspective de pouvoir prendre des paris n'importe où devrait, à terme, révolutionner la façon de jouer et donc obliger les opérateurs historiques à évoluer.

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